Règlementation phytosanitaire dans la zone CILSS

Organes et instruments de gestion des pesticides

Depuis plus de 40 ans, il existe dans la zone CILSS (Comité permanent Inter-Etats de Lutte Contre la Sécheresse au Sahel), un établissement public inter-étatique, l’Institut du Sahel (INSAH), qui coordonne et anime la recherche-action pour garantir la Sécurité Alimentaire et la lutte contre la Sécheresse/Désertification, pour un meilleur équilibre écologique au Sahel. Cet établissement possède en son sein le Comité Sahélien des Pesticides (CSP), un organe qui a pour tâches de prendre des décisions communes en matière de circulation et d’utilisation judicieuse des pesticides à l’ensemble des pays appartenant au CILSS.

Réglementation dans la zone CILSS

La Réglementation commune aux Etats membres du CILSS sur l’homologation des pesticides a été adoptée pour la première fois en 1992 à travers la résolution N° 7/27/CM/92 de la 27ème session ordinaire du Conseil des Ministres du CILSS. Elle est devenue opérationnelle en 1994 par biais de l’Institut du Sahel (INSAH) par la mise en place et l’opérationnalisation du CSP. Suite aux multiples tentatives de ratifications par les Assemblées Nationales des différents Etats membres, la Réglementation commune a été, avec l’appui de la FAO, révisée le 16 décembre 1999 par la Résolution n°8/34/CM/99de la 34ème session du Conseil des Ministres du CILSS, et ce pour tenir compte de divers développements dans les législations des pesticides dans les Etats membres, ainsi que des expériences dans les procédures d’homologation des pesticides acquises par le CSP depuis sa création.

Ce système commun d’homologation des pesticides est basé sur les raisons suivantes :

  • Les conditions agronomiques, climatiques et écologiques sont presque similaires dans le Sahel, ce qui facilite l’harmonisation des essais et l’acceptation mutuelle des données ;
  • Les expertises techniques et scientifiques nécessaires pour l’homologation, limitées dans chaque pays, peuvent être mises en commun au profit de tous les pays ;
  • Le marché de pesticides est plus grand au niveau de l’ensemble des pays, ce qui augmente le pouvoir règlementaire, notamment pour imposer des frais de dossier, de la structure commune d’homologation ;
  • Un « guichet unique » est créé pour déposer des demandes d’homologation, et une seule autorisation est valable dans l’ensemble des Etats membres du CILSS, ce qui facilite les procédures pour l’industrie des pesticides ;
  • Une autorisation unique pour la circulation des pesticides dans l’espace CILSS réduit le nombre de frontières où l’importation de pesticides doit être contrôlée ;
  • La prise de décision commune, sur le plan régional, réduit le risque d’être confronter aux conflits d’intérêt nationaux.

Comité Sahélien des Pesticides (CSP)

Le CSP est l’instance chargée de l’homologation des pesticides au nom des Etats membres du CILSS. Il détient le registre des homologations et des autorisations des pesticides qui sont autorisés pour la protection des cultures dans 9 pays de la zone CILSS. Il s’agit de : Burkina Faso, Cape vert, Gambie, Guinée Bissau, Mali, Mauritanie, Niger, Sénégal et Tchad.

Tout dernièrement en 2011, quatre pays (Côte d’Ivoire, Bénin, Guinée (Conakry), et Togo) ont rejoint le CILSS. Ce qui fait aujourd’hui 13 pays. Toutefois, ces quatre pays n’ont pas eu encore ratifier la Réglementation commune aux Etats membres du CILSS sur l’homologation des pesticides sous le prétexte qu’ils ont signés en 2008 le Règlement C/Reg.3/05/2008 portant harmonisation des règles régissant l’homologation des pesticides dans l’espace CEDEAO et que ce dernier, une en entré en vigueur, supplante tous les Réglementations commun dans la zone.

Objectifs du CSP

La mission du CSP est notamment :

  • promouvoir et coordonner les activités, études et recherches sur les intrants agricoles (semences, pesticides, engrais), la biosécurité et la protection des cultures ;
  • favoriser la mise en synergie des textes législatifs et règlementaires sur les intrants agricoles et la biosécurité dans la sous région ;
  • suivre la mise en œuvre des réglementations et des conventions régionales et internationales liées aux intrants agricoles ;
  • veiller à l’application des décisions des comités régionaux de réglementation et d’harmonisation des intrants agricoles aux niveaux sous régional et national ;
  • promouvoir la gestion intégrée des déprédateurs des cultures.

Attribution du Comité Sahélien des Pesticides (CSP)

Le CSP a pour missions principales :

  • définir les méthodes de contrôle de la composition, de la qualité et de l’évaluation des produits à l’égard de l’homme, des animaux et de l’environnement ;
  • définir des directives techniques concernant les données à fournir par le demandeur de l’homologation et les expérimentations à exécuter ;
  • tenir le registre des homologations et des autorisations ;
  • faire l’inventaire des pesticides utilisés ou commercialisés dans les pays du CILSS ;
  • établir une liste des pesticides d’emploi interdit ou sévèrement règlementé dans les pays du CILSS ;
  • maintenir les liens avec les Comités Nationaux de Gestion des Pesticides (CNGP) dans les pays du CILSS.

Cet organe va être remplacé dans les mois à venir par un nouvel établissement qui va couvrir tous les pays de l’Afrique de l’Ouest.

Champ d’application de la réglementation

Le champ d’application de la Réglementation commune est : l’autorisation, la mise sur le marché, l’utilisation et le contrôle des matières actives et des produits formulés des pesticides dans les Etats membres. Cette Réglementation est aussi applicable à la classification, l’étiquetage, le conditionnement et l’emballage des formulations de pesticides.

La gestion des pesticides, comme le stipule la Réglementation commune, est basée sur un partage des responsabilités entre le niveau régional et le niveau national. Les activités de pré-homologation (expérimentation) et de post-homologation (mise sur le marché, importation/exportation, utilisation, surveillance, information et destruction des produits périmés) sont menées par les structures nationales de recherche et de vulgarisation. Le rôle du niveau régional est de procéder à l’évaluation des dossiers pour l’homologation. Le CSP publie chaque année au moins une liste des pesticides homologués qui devraient être utilisés dans les pays membres du CILSS. Ces listes sont entre autres :

  • la liste globale des pesticides incluant toutes les catégories des produits de protection des cultures ;
  • la liste des insecticides pour combattre les insectes ;
  • la liste des acaricides pour lutter contre les acariens ;
  • la liste des herbicides pour détruire les mauvaises herbes ;
  • la liste des fongicides, contre les champignons incluant des produits pour le traitement des semences ;
  • la liste des nématicides pour combattre les nématodes ;
  • la liste des bactéricide pour lutter contre les bactéries phytopathogènes ;
  • la liste des rodonticides ou raticides pour combattre contre les rongeurs.

Il existe sur ces listes des produits de lutte biologique pour combattre les ennemis des cultures. C’est le cas des produits Bt à base de suspensions de Bacillus thuringiensis contre les chenilles ou des produits à base de suspensions d’Aspergillus contre les aflatoxines. Toutefois, quand on analyse attentivement les listes des pesticides qui sortent chaque année, on remarque une très faible présence des produits de lutte biologique. Cette situation est très insuffisante pour la promotion d’une agriculture durable, présentant moins de risques pour la santé humaine et pour l’environnement dans l’espace communautaire.

Forces et faiblesses Comité Sahélien des Pesticides

La Réglementation commune qui est une coopération Inter-Etats très étroite pour l’homologation et la gestion des pesticides au sein de l’espace CILSS est aujourd’hui citée comme une référence dans le monde. Cependant, cette réglementation présente des forces et les faiblesses qu’il faille capitaliser pour une meilleure promotion d’une agriculture durable et de la sécurité alimentaire et nutritionnelle des populations.

Forces

  • le système est fonctionnel depuis 1994. Il n’a pas été remis en cause ;
  • la base juridique est forte (ratification par les Etats membres) ;
  • autonomie financière relative ;
  • le personnel du Secrétariat Permanent possède une très bonne connaissance du travail à réaliser et a l’expertise nécessaire ;
  • la mise en commun des expertises dans un système sous régional pour une évaluation solide des demandes d’homologation ;
  • l’existence d’une base de données fonctionnelle et régulièrement mise à jour sur les pesticides : pesticides autorisés (en Autorisation Provisoire de Vente ou en homologation), et pesticides interdits ;
  • existence de documents techniques pour l’évaluation des demandes d’homologation de pesticides (dossier d’homologation de pesticides à usage agricole, dossier d’homologation de pesticides en santé publique, dossier d’homologation de biopesticides, manuel de procédures, protocoles cadres et protocoles spécifiques pour l’expérimentation des pesticides) ;
  • le respect des procédures de base, la disponibilité de bonnes grilles de lecture et de décisions sur les dossiers ;
  • le respect de la confidentialité.

Faiblesses

  • absence quasi-totale de contrôle des pesticides (conformité, résidus, transport, stockage, conditions d’utilisation,…) circulant dans les pays membres ;
  • faible promotion des produits biologiques ;
  • absence quasi-totale de sanctions ;
  • non fonctionnalité des CNGP dans certains pays ;
  • faible évaluation des risques de pesticides pour la santé humaine et l’environnement ;
  • multitude de langues de travail (français, anglais, arabe, portugais) ;
  • Insuffisance d’expertise technique dans certains domaines.

Quelques références citées

CILSS, 1999. Résolution n°8/34/CM/99 du 16 décembre 1999 portant Réglementation commune aux Etats membres du CILSS sur l’homologation des pesticides Version révisée Décembre 1999.

Diarra, A., 2015. Revue des politiques sur les pesticides et les produits vétérinaires dans l’espace CEDEAO. USAID/WA, N° West Africa-JSR-2015-2.

REDISSE, 2016. Plan de gestion intégrée des vecteurs et des pesticides du projet. Rapport provisoire. Dakar, Sénégal.

Ruelle P., Van der Valk, H & Sylla, C.H., 2012. Evaluation du système d’homologation commune des pesticides dans les Etats membres du CILSS et du Comité Sahélien des Pesticides Rapport de la mission d’évaluation indépendante FAO 2012.

Consulter Réglementation dans la zone CILSS en anglais

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